Paul-André Proulx

Littérature Québecoises

Archambault, Gilles

Comme une panthère noire. Éd. du Boréal, 2001, 161 p.

De la tiédeur humaine

Gilles Archambault, l'un des doyens de nos écrivains, est le Molière de notre littérature. Selon ces deux auteurs, l'humanité se réduit à nos faiblesses. Par contre, Archambault ne fait pas de ses héros des êtres atrabilaires, excédés par la mollesse comme le Misanthrope. " Courir à sa perte ", l'œuvre précédente de cet auteur, serait la devise de la plupart d'entre eux. Paraît-il qu'il n'y a pas moyen d'échapper à ce destin peu glorieux, lequel guette, comme une panthère affamée, pour que le bilan de la vie remplisse la colonne des débits.

Les personnages de la douzaine de nouvelles de cette œuvre sont tous des copies conformes de la perception que l'auteur s'est donné au cours de ses 70 ans de vie. Il est né en 1933, l'époque de la dépression économique. Il n'en fallait pas plus pour qu'il poursuive inlassablement sa quête dépressionnaire afin de prouver que l'homme est un perdant. Évidemment, ils cherchent ses exemples chez les plus vulnérables alors que la mort brandit déjà son spectre.

Faut-il pleurer, faut-il en rire? Archambault a le cœur à le dire. Ce sont des millions de vies dérisoires marquées par l'incompréhension, la trahison, la tiédeur, le désintérêt, le manque d'amour. Bref, c'est à désespérer du genre humain. L'auteur lancerait-il un message pour que l'humanité se ressaisisse? Veut-il se faire le Messie qui chasse les veules du temple? Cette vision a le désagrément d'être un couteau à deux tranchants. Elle stimule les résignés et exalte les intégristes.

Si ce genre d'œuvre compte un revers de médaille douteux, il ne faut pas douter par contre de la qualité de l'écriture de cet auteur, le plus français de nos écrivains. Il évite même les québécismes de bon aloi. Cependant un petit cours sur la structure de la nouvelle lui serait profitable pour apprendre à concocter un dénouement inattendu. Ses nouvelles finissent toujours en queue de poisson.