Tremblay,
Lise.
La
Danse
juive.
Éd.
Leméac,
1999,
142
p.
L'Obésité
féminine
L'obésité
féminine
est
frappée
d'ostracisme.
Les
canons
de
la
beauté
prônent
la
sveltesse
des
corps,
voisine
de
l'anorexie.
Les
photographes
de
mode,
qui
recourent
aux
adolescentes
pour
présenter
les
tenues
vestimentaires
de
la
femme
adulte,
envoient
un
message
subliminal
plutôt
clair
:
ayez
le
corps
sans
défauts
de
la
fille
de
quatorze
ans.
Il
faut
offrir
aux
regards
d'autrui
l'image
de
l'éternelle
jeunesse.
Le
mensonge
est
devenu
un
art
de
vivre
au
détriment
de
ce
que
nous
sommes.
L'héroïne
de
La
Danse
juive
est
une
pianiste
de
150
kilos.
On
comprend
que
le
corps
occupe
ses
pensées.
La
société
a
fait
du
tour
de
taille
un
handicap
physique,
voire
mental.
Cette
problématique
engendre
des
obsessions,
qui
vont
de
la
culpabilité
aux
pensées
suicidaires,
en
passant
par
la
réclusion
volontaire.
On
ne
veut
pas
s'offrir
en
spectacle
aux
regards
dégoûtés
de
ses
pairs.
C'est
dans
cette
foulée
que
s'inscrit
ce
roman
qui
réagit
aux
fabricants
d'images.
Les
parents
répondent
à
l'obésité
de
leur
fille
par
un
silence
éloquent.
C'est
celui
des
géniteurs
mal
à
l'aise
devant
un
rejeton
qui
ternit
l'image
familiale.
L'héroïne
ne
pardonnera
pas
à
sa
mère
de
tenir
un
rôle
tacite
en
accord
avec
les
exigences
d'une
société
bornée
au
filiforme.
Le
père
n'est
pas
moins
excédé
par
sa
fille.
Il
s'en
veut
d'avoir
engendré
"
une
truie
au
sein
de
ses
petites
poulettes
".
Lui,
un
scripteur
d'histoires
à
succès
qui
glorifient
la
minceur
pour
une
chaîne
de
télévision.
On
comprend
que,
dans
un
tel
contexte,
sa
fille
ne
puisse
s'en
faire
un
allié.
Pourtant
l'héroïne
aimerait
développer
un
lien
d'appartenance
profond
avec
sa
famille,
mais
la
"
graisse
"
fait
plutôt
glisser
son
désir
vers
des
projets
mortifères.
Mieux
vaut
mourir
que
de
fuir
ce
que
l'on
est.
L'héroïne
préfère
assumer
son
état
malgré
le
rejet
qui
en
résulte.
Sa
transgression
des
normes
la
conduit
à
mieux
se
connaître.
Elle
n'est
pas
seulement
un
clown
qui
ressemble
à
une
baleine.
C'est
une
femme
comme
les
autres,
une
femme
sensuelle
qui
veut
aimer
et
être
aimée.
Ce
roman
de
la
quête
d'autrui
propulsera
l'héroïne,
de
guerre
lasse,
dans
une
dynamique
d'autodestruction.
En
décrivant
le
monde
de
la
femme
obèse,
Lise
Tremblay
a
écrit
un
petit
chef-d'œuvre,
récompensé
par
le
prix
du
Gouverneur
général.
On
sent
que
la
problématique
dépasse
le
cadre
de
la
victime.
La
Danse
juive
englobe
tout
l'univers
familial,
dont
la
seule
hérédité
n'explique
pas
tout,
et
les
normes
abrutissantes
défendues
par
les
fabricants
de
beauté,
qui
s'enrichissent
au
détriment
des
corps
abîmés
sans
égard
à
l'âge
des
gens.
L'écriture
anime
le
roman
de
belle
façon.
C'est
une
danse
infernale
aux
pas
contrastants.
Tantôt
c'est
la
ronde
sereine
dans
une
rue
de
Montréal,
tantôt
ce
sont
les
pas
vifs
de
la
polka
qui
suscitent
de
vives
réactions
chez
l'héroïne.
Bref,
elle
est
stigmatisée
par
son
obésité,
comme
l'héroïne
de
Francine
Allard
qui
sent
bien
qu'elle
n'est
pas
"
une
belle
pitoune
en
or
"
aux
yeux
de
son
mari.
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