Bouthillette,
Claude.
La
Trace
de
l'escargot.
Éd.
JCL,
2005,
364
p.
Le
Meurtre
comme
l'un
des
beaux-arts
Le
polar
mène
à
tout.
Benoît
Bouthillette
en
donne
une
preuve
éloquente
avec
La
Trace
de
l'escargot,
publié
par
une
petite
boîte
de
Ville
Saguenay,
plutôt
réputée
pour
ses
publications
conventionnelles.
Avec
cet
auteur,
elle
rompt
ses
habitudes
en
offrant
un
roman
étoffé
que
l'on
peut
rapprocher,
selon
certains
aspects,
de
Prochain
Épisode
d'Hubert
Aquin.
La
toile
sociale
de
l'œuvre
s'incarne
dans
les
déviances
d'un
psychopathe
obnubilé
par
Francis
Bacon
(1909-1992),
un
peintre
britannique
d'origine
irlandaise,
qui
favorise
une
imagerie
effroyable
de
l'humanité.
Ses
tableaux
inspirent
donc
un
désaxé
pour
établir
le
rituel
entourant
les
meurtres
qu'il
projette
de
commettre.
Tous
portent
la
signature
d'un
esprit
cultivé
qui,
selon
un
triptyque,
s'attache
aux
fondements
de
notre
civilisation,
à
savoir
la
religion,
l'argent
et
l'état.
Ainsi
sont
assassinés
un
prêtre,
un
courtier
et
la
fille
de
16
ans
du
Gouverneur
général
du
Canada.
C'est
à
travers
ces
crimes
symboliques
que
l'auteur
examine
avec
une
lucidité
glaciale
les
tenants
et
les
aboutissants
du
comportement
humain
qui
traduit,
depuis
la
nuit
des
temps,
la
haine
et
l'amour
tapis
au
fond
des
cœurs.
Le
héros
du
polar,
un
policier
autochtone,
se
voit
confier
la
mission
de
débusquer
cet
esprit
malade.
Appuyé
par
ses
"
deux
idiots
",
expression
affectueuse
pour
désigner
ses
collègues,
Benjamin
Sioui
se
lance
dans
une
enquête
éperdue
qui
le
conduit
dans
les
rues
les
plus
glauques
de
Montréal.
Les
bars
alternatifs
et
les
édifices
suspects
l'attendent
au
détour
pour
lui
barrer
la
route.
C'est
mal
connaître
ce
Montagnais,
capable
d'affronter
l'esprit
le
plus
articulé
et
le
plus
cultivé
qui
soit.
Peintre
et
archiviste
de
formation,
Benjamin
est
un
fin
connaisseur,
aussi
à
l'aise
avec
la
musique
alternative
qu'avec
l'informatique,
l'histoire,
la
religion,
la
littérature.
Une
encyclopédie
qui
méduse
le
lecteur
!
À
l'instar
de
Francis
Bacon,
il
a
saisi
le
mal
qui
dévaste
nos
sociétés
modernes.
Mais,
contrairement
au
peintre
britannique,
le
héros
ne
désespère
pas
de
l'humanité
même
s'il
a
perdu
ses
illusions
depuis
longtemps.
Menant
son
combat
manichéen
sur
tous
les
fronts,
il
veut
laisser
sa
trace,
tel
un
escargot,
pour
que
le
bien
triomphe.
Il
s'y
emploie
de
toutes
ses
forces
et
avec
une
certaine
naïveté.
Au
fond,
c'est
un
grand
romantique,
amoureux
fou
du
médecin
légiste
qui
l'accompagne
dans
ses
fonctions.
Pour
elle,
il
est
prêt
aux
pires
folies,
surtout
quand
son
amoureuse
apparaît
dans
la
lorgnette
de
celui
qu'il
pourchasse.
Ce
polar
met
l'accent
sur
un
phénomène
qui
est
en
train
de
reprendre
du
galon
dans
les
sociétés
occidentales.
Le
meurtre
deviendra-t-il
l'un
des
beaux-arts
pour
régler
les
conflits
personnels
?
En
somme,
la
trame
est
assez
conventionnelle.
L'intrigue
pose
un
dilemme
formel.
Qui
est
le
meurtrier
et
quels
sont
ses
motifs
?
C'est
la
facture
qui
détonne.
Un
peu
à
la
manière
de
Mathieu
Arsenault
dans
Album
de
finissants,
Benoît
Bouthillette
traduit
la
pensée
vagabonde
de
ses
personnages
par
une
écriture
respectueuse
de
la
fluidité
de
ce
qui
surgit
spontanément
dans
l'esprit.
Ça
donne
des
phrases
lourdes
empruntées
au
langage
parlé,
dans
lesquelles
les
dialogues
et
la
narration
s'entremêlent,
accompagnés
de
références
culturelles
et
historiques
mises
en
lien
pour
propulser
le
déroulement
de
l'action.
C'est
donc
un
roman
exigeant
qui
nécessite
plus
d'une
lecture.
Par
contre,
le
lectorat
branché
ne
tarira
pas
d'éloges
pour
ce
polar
qui
calque
l'univers
d'un
peintre
comme
Le
Rouge
idéal
de
Jacques
Côté
calquait
celui
de
Baudelaire.
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