Paul-André Proulx

Littérature Québecoises

Beauchemin, Yves

Le Matou. Éd. Québec Amérique, 583 p.

Un restaurateur mal pris

Yves Beauchemin est un écrivain très populaire. Son roman Le Matou a même fait l'objet d'un scénario de film. On y raconte l'histoire de Florent, un restaurateur aux prises avec un personnage fantastique, le vieux Ratablavasky qui représente le mal, et l'Anglais Slipskin qui tente de détruire son commerce. Mais grâce à Monsieur Émile, un enfant déluré que le héros a pris en affection, il réussira à déjouer toutes les ruses qui concourent à sa perte.

Ce n'est pas une œuvre majeure. L'auteur écrit pour divertir avec humour. Ses personnages sont à la limite de la crédibilité, mais on s'y attache parce qu'ils rejoignent nos cordes sensibles : la générosité. C'est donc de la littérature qui s'adresse à un vaste public. Ça suit le courant des années 80 au Québec alors que les auteurs ont tenté, avec un succès certain, d'imiter les best-sellers américains, telle Arlette Cousture.

La portée sociale et humaine est réduite à sa plus simple expression. Il s'agit de La Binerie, le nom véritable d'un restaurant de quartier, fort couru d'ailleurs par les étudiants en manque d'argent. Le héros est un naïf qui s'engage dans une aventure en se fiant à tout le monde. Heureusement que le jeune garçon et son chat Déjeuner sont là pour l'aider à se sortir du pétrin. Une histoire d'entraide qui finit par ressembler à un polar pour démasquer ceux qui nuisent au commerce tenu par Florent.

C'est une œuvre qui comble bien les temps morts quand on ne veut pas se montrer exigeants. Encore là, faut-il aimer les ficelles qui soutiennent un best-seller. Une histoire simple, des portraits à peine esquissés, un peu de sentiments, beaucoup de bavardage et un suspense pour soutenir l'intérêt : qui empoisonne les clients de La Binerie ? Voilà les ingrédients qui composent ce roman qui saura enchanter ou déplaire selon les attentes du lecteur.

C'est un roman intéressant mais l'auteur a construit une œuvre qui se nourrit à tous les râteliers : une bouchée de fantastique, une bouchée d'humour, une bouchée de drame, une bouchée de polar, une bouchée d'affection. Et une conclusion : que le monde peut être méchant parfois ! Il faut s'aimer, voyons. C'est amusant malgré tout. Et Beauchemin a de la verve.