Richler,
Mordecai.
Le
Monde
de
Barney
.
Éd.
Albin
Michel,
1999,
557
p.
Les
Mémoires
d’un
juif
montréalais
Avec
Victor-Lévy
Beaulieu,
Mordecai
Richler
forme
le
meilleur
duo
d’écrivains
du
Québec.
Comme
il
l’écrit
dans
son
roman,
cet
auteur
se
montre
plus
«
respectueux
des
Québécois
»
que
le
laissent
entendre
les
préjugés
qui
circulent
à
son
sujet.
Seule
une
courte
phrase
indique
qu’il
est
agacé
par
notre
tribalisme.
Nous
pouvons
lui
rendre
la
pareille
quand
il
s’insurge
contre
la
toponymie
qui
a
tronqué
le
boulevard
Dorchester
pour
le
boulevard
Maisonneuve.
Erreur
?
Il
serait
mal
venu
de
l’expliquer
parce
que
le
dénouement,
émouvant,
repose
justement
sur
ces
nombreux
fourvoiements,
signalés
en
bas
de
page
par
le
fils
du
héros,
qui
a
révisé
le
roman
de
son
père.
Barney
Panofsky,
un
juif
argenté
de
67
ans,
a
décidé
d’écrire
ses
mémoires.
Producteur
pour
la
télévision
d’État,
il
se
déplace
entre
son
bureau
du
centre-ville,
sa
résidence
sise
sur
les
berges
d’un
lac
des
Laurentides
et
sa
maison
de
Montréal,
une
ville
qu’il
aime
profondément
et,
en
particulier,
le
club
de
«
Nos
Glorieux
»,
dont
il
est
un
assidu
des
matches,
même
le
soir
de
ses
noces.
Marié
trois
fois
et
père
de
trois
enfants,
le
héros
a
un
caractère
exécrable
qu’il
admet
bien
volontiers.
Boire,
fumer,
mentir
et
«
tringler
les
gisquettes
»
(baiser
les
putes),
rien
n’est
hors
de
sa
portée.
On
aimerait
bien
le
fusiller
à
l’aube,
mais
l’auteur
ménage
ses
effets.
Petit
à
petit,
nous
nous
éprenons
de
cet
homme
frustre,
mais
d’une
vaste
culture
qu’il
a
parfaite
en
France
dans
les
années
1950
alors
qu’il
avait
vingt
ans.
Ce
séjour
rappelle
On
The
Road
de
John
Kerouac.
Avec
des
Canadiens
et
des
Américains,
il
mène
une
vie
de
bohême
constituée
de
virées
étourdissantes,
qui
l’ont
mis
en
présence
des
artistes
signifiants
de
l’époque.
Ses
rencontres
ont
contribué
à
alimenter
en
particulier
son
intérêt
pour
la
littérature.
Il
est
quand
même
déçu
des
bonzes
culturels
qu’il
persifle
au
passage,
tels
André
Malraux,
qui
a
volé
des
sculptures
dans
un
temple
de
Phnom
Penh,
et
Jean-Paul
Sartre,
qui
a
soutenu
les
goulags
de
la
Sibérie.
Grincheux,
il
ne
se
sent
pas
concerné
par
l’idéal
qu’il
exige
d’autrui.
Ses
jugements
sans
appel
condamnent
tous
et
chacun,
y
compris
ses
coreligionnaires,
trop
épris
par
l’argent.
La
loi
du
balancier
veut
aussi
qu’il
soit
un
homme
généreux.
Il
paie
les
dettes
de
ses
amis
et
comble
son
entourage
de
cadeaux
onéreux.
Aucun
plan
n’a
semblé
présider
à
la
rédaction
de
cette
œuvre
écrite
sans
linéarité.
Mais
que
non
!
Cet
apparent
fourre-tout
fait
ressortir
un
homme
excentrique
et
iconoclaste,
qui
a
l’art
de
gaffer
au
point
d’être
accusé
de
la
mort
de
son
meilleur
ami.
Homicide,
qui
constitue
l’intrigue
secondaire,
servant
à
soutenir
l’intérêt
de
ce
magnifique
roman,
entaché
par
une
traduction
lamentable.
L’éditeur
Albin
Michel
n’a
pas
cru
bon
de
recourir
à
quelqu’un
qui
connaît
le
Québec
et,
surtout,
le
hockey
que
l’on
traite
comme
s’il
s’agissait
de
soccer.
Bref,
sous
le
signe
de
l’humour,
ce
roman
est
une
chronique
d’un
quotidien
impétueux
et
une
rubrique
culturelle,
unifiées
intelligemment
dans
un
magma
par
un
auteur
qui
a
du
souffle.
Du
grand
art
!
|