Paul-André Proulx

Littérature Québecoises

Marsan, André.

Le Robineux du Plateau. Éd. JCL, 2005, 181 p.

Le Clochard

André Marsan se penche avec empathie sur le sort d'un " robineux " du Plateau Mont-Royal. Il démontre les ressorts qui propulsent un individu vers sa déchéance. Laissant de côté la psychanalyse, il recourt plutôt à la théologie pour souligner la dynamique de ces clochards qui soulèvent bien souvent notre indignation. La lecture de ce roman ajuste le regard que nous portons sur ces gens, victimes de l'incompréhension d'autrui.

L'antihéros est un Montréalais de la paroisse Saint-Louis-de-France. Enfant, il rêve de sacerdoce, mais le destin le fait dévier de sa route. Sa vocation, imposée par l'esprit de l'époque si l'on est un garçon studieux et réfléchi, l'ébranle à un point tel qu'il prend la route de l'exil. Il se retrouve à Toronto et à Vancouver où il prend un virage qui le conduit à la clochardise. De retour à Montréal pour sauver sa peau, il quadrille les rues du Plateau Mont-Royal sans être reconnu de quiconque, s'occupant parfois à de menus travaux pour des religieuses. Un jour, on le retrouve inanimé sur le trottoir. Emmené à l'hôpital, il reçoit la visite de sœur Dominique, qui réussit à le réconcilier avec lui-même et avec autrui.

En somme, l'auteur présente le cas d'une dépression issue de la difficulté de prendre sa place dans le monde et, particulièrement, dans l'Église que l'on veut servir. Comme le héros est un être sensible, le renoncement à ses besoins, comme l'amour, le conduit aux portes de la folie. Cette trame condamne en douce toutes les normes qui réduisent les humains à des pions sur un échiquier. Par respect de la rectitude, on finit par oublier l'essentiel, l'accueil d'autrui. Que ce soit dans la fonction publique ou dans les communautés religieuses, les règlements se vident de sens quand on perd de vue ceux à qui ils s'appliquent.

Ce roman nous sensibilise au sort des déjantés en donnant la voix à l'un d'eux. C'est très humain comme fond. Par contre, cette histoire de vocation sacerdotale qui a mal tourné est traitée avec l'esprit d'une autre époque. L'écriture est trop fleur bleue pour qu'on y croie vraiment. Bref, l'œuvre baigne dans une sensiblerie qui amoindrit sa portée.