Paul-André Proulx

Littérature Québecoises

Tougas, Francine.

Les Mardis de Béatrice. Éd. Libre Expression, 2004, 196 p.

Une femme de 40 ans chez le psy

On porte un intérêt grandissant aux psys. Ils sont devenus malgré eux les initiateurs de la sorcellerie moderne. Les revues comme Reader's Digest nous inondent de questionnaires pour que nous nous jaugions nous-mêmes. Dans le sillage de cette mode, Francine Tougas a écrit Les Mardis de Béatrice qui rapportent les séances hebdomadaires d'une quadragénaire avec son psy d'obédience freudienne.

C'est une jolie femme qui travaille dans une boîte de publicité renommée. Mais à 40 ans, elle se considère comme une nulle en dépit de son expérience. L'héroïne consulte donc tous les mardis un spécialiste pour recouvrer sa confiance en elle. Comme Marie Cardinal dans Les Mots pour le dire, elle veut abandonner cette thérapie qui se dérobe à son entendement. Malgré tout, elle persévère même si les consultations n'engendrent que fatigue, confusions et crises de larmes. Peu à peu, son psy parvient à vaincre sa mauvaise volonté en lui faisant découvrir que son enfance est à l'origine de tous ses maux : un père dominateur, une mère alcoolique et un frère dont elle se tient responsable de la mort.

Rien de nouveau sous le soleil : illustration classique du complexe d'Oedipe. Le roman ne ressemble pas pour autant à un traité. On apprend comment se déroulent les séances de confessions, mais surtout comment elles peuvent être déstabilisantes. En fait, l'auteure effleure le déséquilibre d'une femme moderne aux prises avec un passé ombrageux et un boulot qui mène à l'épuisement professionnel. Limité aux seules rencontres de Béatrice avec son psy, le procédé devient lassant, d'autant plus que l'on recourt en thérapie à la technique du disque brisé pour défricher les causes de la détresse. Heureusement, l'humour agrémente un peu le propos. Mais ce sont les dialogues qui sauvent le tout. Ils sont vivants et écrits dans une langue qui voisine une oralité de bon ton.