Paul-André Proulx

Littérature Québecoises

Léveillé, J. Roger.

Le Soleil du lac qui se couche. Éd. du Blé, 2001, 88 p.

Métisse du Manitoba initiée à la culture japonaise

L'auteur est un Manitobain qui nous initie à la culture nipponne par le biais d'Angèle, une Métisse de vingt ans qui s'éprend d'Ueno Takami, un bonze de soixante-quatre ans. Venu s'établir sur les bords du lac Setting situé au nord de la province, cet homme d'une grande culture s'intéresse à la peinture, à la musique et, surtout, à la poésie.

À la suite d'une rupture, l'héroïne rencontre ce Japonais à Winnipeg. Petit à petit, elle s'attache à cet être intrigant à cause de sa culture. Comme elle se destine à l'architecture, c'est l'espace qui préside finalement à leur liaison. La notion du wabi-sabi insiste pour que l'environnement favorise l'émergence des éléments naturels des humains. D'ailleurs, l'agencement spatial au Japon doit répondre à des règles rigoureuses afin de créer un milieu en harmonie avec certains principes de vie. Ueno s'est donc construit une cabane isolée dans la forêt de Wabowden, village situé à huit heures de route de Winnipeg. C'est dans cet univers qu'Angèle se forgera une identité qui mariera facilement culture indienne et nipponne.

Cette philosophie de la vie s'accroche à la géographie des plaines de l'Ouest canadien. Cet immense territoire ne peut être véritablement habité que si l'on intériorise ce qui le distingue. La forêt du Nord offre son refuge aux habitants du Sud pour qu'ils échappent à l'égarement des temps modernes. Les points cardinaux réfèrent à une dynamique qu'il faut connaître pour apprécier les œuvres manitobaines à sa juste valeur. Le Soleil du lac qui se couche illustre ce dilemme que l'on retrouve dans Le Cantique des Plaines de Nancy Huston. Les déplacements deviennent donc importants pour se réaliser. Angèle parcourt ainsi allègrement la grande distance en autocar entre la capitale et le lac Setting. C'est la route qui mène à son en-soi contrairement à celle de Jack Kerouac qui conduit à la déroute.

À l'encontre des jeunes héros de la vingtaine dont le désarroi est alarmant, Angèle se présente comme une héroïne qui réussit avec sérénité à devenir une femme. Son mentor l'a aiguillée sur une voie qui rapproche de l'essence humaine, un amour mêlé à la spiritualité. C'est un projet essentiel sur un territoire peuplé, depuis peu, d'habitants de toutes origines.

Plus vieille, Angèle consigne dans un journal les moments importants de sa vie amoureuse avec un Asiatique. Chacune des insertions dans le journal ressemble à un petit haïku. C'est poétique, mais parfois d'une grande lourdeur. N'empêche que c'est un bon condensé du questionnement des Manitobains.