Paul-André Proulx

Littérature Québécoise

Boulanger, Patrick.

Les Restes de Muriel. Éd. Triptyque, 2007, 96 p.

Un mari batteur de femme

Les éditeurs que l'on accuse de tous les maux se montrent très généreux à l'égard de certains romanciers. Patrick Boulanger fait partie de ceux-là. Les Restes de Muriel est un roman inachevé qui ne parvient pas à nous convaincre de la souffrance morale du héros en deuil de sa conjointe.

Cette jeune femme de Précieux-Sang, un village situé en face de Trois-Rivières, sur la rive sud du Saint-Laurent, ne supporte plus le caractère de Marc. Homme retors qui la bat et la détruit. Il comble sa vulnérabilité en la dominant par la force physique. Même, si comme un alcoolique, il lui promet mer et monde en lui tendant des fleurs, Muriel le quitte pour échapper au règne de terreur dont elle est victime. Le héros perd ainsi l'être qui le confortait dans ses faiblesses. Le deuil est d'autant plus douloureux qu'il s'agit d'un homme veule. Grâce à l'écriture, il fait revivre sa conjointe dont l'enfance ne fut pas un jardin de roses ainsi que toutes les femmes qui se sont trouvées un jour ou l'autre dans son sillage. Ce qui le pousse vers elles, ce n'est pas l'amour, mais le désir de les dominer pour oublier qu'il se sent un " reject " à cause de son bégaiement et de ses carences érectiles.

Ce portrait ne suscite pas d'intérêt pour le protagoniste que le lecteur, capté par le roman, voudrait aider dans son for intérieur. On le laisse à ses compensations masturbatoires qui empestent son un et demi délabré. En fait, on ne croit pas à cette histoire pathétique. Au lieu de creuser la personnalité du héros, l'auteur se livre à des élucubrations fantomatiques apparentées à la littérature baroque. Faute d'assises solides, les antithèses, les analogies et les symétries ne s'ouvrent pas à une meilleure compréhension de l'âme du héros. Bref, ce n'est pas une œuvre qui témoigne d'une vaste expérience de la vie.