Guèvremont,
Germaine.
Le
Survenant.
Éd.
Fides,
1967,
248
p.
(Édition
originale
:
1945)
L'Âme
québécoise
des
années
1900
Germaine
Guèvremont
compte
parmi
les
derniers
écrivains
à
suivre
la
tradition
des
romans
de
la
terre.
Dans
une
lignée
remontant
à
Philippe
Aubert
de
Gaspé
en
passant
par
Louis
Hémon
et
son
cousin
Claude-Henri
Grignon,
elle
renoue
avec
une
matière
triturée
tout
au
long
de
la
première
partie
du
20e
siècle.
Nous
retrouvons
une
population
encore
cimentée
dans
les
vertus
de
l'agriculture,
mais
qui
laisse
voir
certaines
fissures.
Ayant
fait
l'objet
d'un
télé-feuilleton
au
début
de
la
télévision
en
1952,
ce
roman
a
conquis
le
cœur
de
tous
les
Québécois.
Nous
avions
hâte
d'entendre
le
Survenant
dire
"
never
mind
"
à
ceux
qui
lui
reprochaient
ses
entorses
à
la
tradition.
Ce
personnage
traçait
la
voie
aux
âmes
désireuses
de
se
libérer
du
consensus
social
qui
les
rivait
aux
mancherons
de
la
charrue.
La
bucolique
a
ses
charmes,
mais
l'atavisme
terrien
produit
aussi
ses
drames.
Dans
cette
oeuvre,
les
habitants
de
Sainte-Anne-de-Sorel,
village
connu
pour
son
célèbre
Chenal-du-Moine,
sont
ravagés
par
les
rivalités.
Chacun
se
fait
une
fierté
d'avoir
réussi
dans
la
vie
sans
chercher
pour
autant
à
réussir
sa
vie.
L'idéal
d'Angélina
Desmarais
est
tout
autre.
Cette
célibataire
boiteuse
ressent
pour
le
Survenant
un
attrait
particulier
à
cause
du
mystère
qu'il
entretient
sur
sa
personne.
Cet
homme,
venu
de
nulle
part,
incarne
le
rêve
d'un
ailleurs
moins
sclérosant.
Angélina
aimerait
suivre
ce
"
dieu
des
routes
"
qui
plante
son
baluchon
où
bon
lui
semble.
C'est
ainsi
qu'un
soir
d'automne,
le
héros
s'amène
chez
les
Beauchemin.
Accueilli
par
un
père
vieillissant,
il
s'installe
au
sein
d'une
famille
dévorée
par
le
ressentiment.
Incapable
de
se
projeter
dans
son
fils
Amable,
un
homme
anémique,
Didace
Beauchemin
voit,
en
ce
nouveau-venu,
le
fils
qu'il
aurait
voulu
avoir.
Germaine
Guèvremont
a
choisi
comme
héros
un
Québécois
auquel
les
femmes
de
l'époque
s'attachaient
:
l'Apollon
qui
a
la
bougeotte.
Que
l'on
pense
à
l'amour
de
Maria
Chapdelaine
pour
François
Paradis
ou
de
Donalda
pour
Alexis
Labranche.
Contrariées
par
le
destin,
ces
prétendantes
se
rabattent
sur
des
hommes
limités
à
la
fructification
de
leurs
avoirs.
Sans
être
des
avares,
ce
sont
davantage
des
hommes
de
possession
que
de
passion.
Le
Survenant
incarne
le
second
volet
de
cette
dichotomie.
C'est
l'être
dégagé
des
biens
matériels
que
le
vent
pousse
aux
quatre
coins
du
monde,
laissant
malheureusement
derrière
lui
des
âmes
meurtries
qui,
le
temps
d'une
saison,
ont
cru
à
la
réalisation
de
leurs
aspirations.
Le
passage
du
Survenant
au
Chenal-du-Moine
a
dirigé
le
projecteur
sur
les
arrière-cours
du
village.
À
l'ombre
du
clocher
de
l'église
s'étalaient
les
beuveries,
les
veuleries,
mais,
surtout,
l'intolérance.
Par
petites
touches
discrètes,
Germaine
Guèvremont
a
brossé
le
tableau
de
gens
frustes
qui
n'aimaient
pas
la
vie.
Ensemble,
Angélina
et
le
Survenant
ont
crié
"
never
mind
"
à
cette
population
engluée
dans
la
tradition.
Malheureusement,
l'auteur
n'a
pas
noué
d'intrigue.
Conjurant
la
force
des
sentiments,
elle
s'est
contentée
de
décrire
une
génération
qui,
à
l'aurore
du
20e
siècle,
tournait
en
rond
sous
l'œil
vigilant
de
leurs
curés.
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