Turcotte,
Élise
L'Île
de
la
Merci.
Éd.
Leméac,
1997,
202
p.
Une
adolescence
à
Cartierville
(Montréal)
Élise
Turcotte
est
le
poète
du
corps.
D'ailleurs,
la
traduction
anglaise
de
L'Île
de
la
Merci
s'intitule
The
Body's
Place.
Le
corps
vu
comme
moyen
d'appréhender
le
monde.
Le
dilemme
de
l'héroïne
consiste
justement
à
trouver
la
voie
qui
amènera
le
sien
dans
le
sillage
de
l'humanité.
L'auteure
renoue
ainsi
avec
la
perception
positive
que
le
Moyen
Âge
et
la
Renaissance
avaient
de
l'anatomie,
et
qui
a
favorisé
l'éclosion
des
chefs-d'œuvre
des
grands
artistes
de
l'époque.
Tous
les
nus
qui
ornent
le
Vatican
témoignent
du
culte
que
l'on
vouait
au
corps
comme
outil
de
connaissance.
Ce
roman
rend
compte
de
cette
dynamique
à
travers
le
personnage
d'Hélène,
une
adolescente
de
Montréal,
qui
habite
près
de
l'île
de
la
Merci.
L'héroïne
est
en
quelque
sorte
l'âme
de
sa
famille
puisque
ses
parents,
emportés
par
le
tourbillon
de
la
vie,
comptent
sur
la
débrouillardise
de
leurs
rejetons
pour
se
conformer
à
la
devise
du
métro-boulot-dodo.
Les
enfants
ne
manquent
de
rien,
sauf
de
l'essentiel.
L'histoire
se
déroule
à
la
saison
estivale
alors
que
l'héroïne
doit
s'occuper
davantage
de
sa
sœur
et
de
son
frère.
Tâche
difficile
puisqu'elle
s'est
trouvé
un
emploi
de
pompiste
pour
l'été.
De
prime
abord,
on
dirait
du
déjà
vu.
Ce
n'est
que
le
canevas
sur
lequel
se
dessinent
rapidement
les
incidents
qui
la
marqueront
au
moment
même
où
sa
crise
d'adolescence
atteint
son
paroxysme.
Il
faut
qu'elle
découvre
son
identité,
qu'elle
détermine
ses
relations
à
autrui,
en
particuliers
celles
à
ses
pairs
de
sexe
masculin,
et
qu'elle
s'insère
dans
un
monde
marqué
par
l'absence
de
valeurs
et
stigmatisé
par
la
violence.
L'île
de
la
Merci
lui
fournit
les
outils
nécessaires
pour
accomplir
la
lourde
tâche
qui
l'attend
pour
l'été
de
ses
quinze
ans.
On
y
découvre
le
corps
d'une
adolescente
violée
et
assassinée.
Cet
événement
rattaché
à
ce
lieu
lui
servira
de
référence
pour
appréhender
l'univers
auquel
elle
doit
s'intégrer.
Ce
n'est
pas
très
engageant,
pas
plus
d'ailleurs
que
ses
liens
familiaux
très
peu
conviviaux.
Devant
ce
dilemme,
Hélène
se
demande
comment
son
corps
pourrait
lui
servir
d'instrument
pour
s'adapter
à
cette
société.
Pour
l'instant,
il
représente
davantage
un
obstacle
qu'une
solution.
Même
en
amour,
elle
ne
sait
pas
composer
avec
lui.
"
Que
ça
finisse
au
plus
vite!
",
se
dit-elle
lors
de
sa
première
expérience.
Cette
transition
de
la
vie
s'accomplit
donc
pour
elle
sous
le
signe
du
fiasco
et
de
la
catastrophe.
L'adolescence
est
une
pente
pour
experts,
mais
que
seuls
les
novices
sont
appelés
à
descendre.
Le
monde
à
l'envers.
Trouver
sa
rédemption
pose
un
défi
de
taille
dans
de
telles
conditions.
Et
souvent
la
fatalité
vient
mettre
en
place
les
pièces
du
puzzle
de
l'existence.
L'énigme
connaît
un
dénouement
salutaire,
mais
qui
s'enracine
dans
l'expérience
de
la
souffrance.
Avec
une
écriture
maîtrisée,
l'auteure
jette
une
lumière
saisissante
sur
la
réalité
des
adolescents,
souvent
perturbés
par
une
société
pas
toujours
édifiante.
|