Paul-André Proulx

Littérature Québécoise

Desjardins, Martine.

Maleficium. Éd. Alto, 2009, 183 p.

Le Rôle de la femme

Martine Desjardins vient de réécrire un chapitre de la Genèse, soit celui de la perte de l’éden. Adam a mangé le fruit défendu à l’invitation de sa compagne Ève. Si la Bible est la parole de Dieu, il faut reconnaître que le susdit passage discrédite la femme qu’Il a pourtant créée.

L’auteure remonte avec un brio inouï aux fondements de la culture occidentale issue du Moyen Orient, où a macéré ce qui allait advenir de notre destinée et, en particulier, de celle de la femme. En regard des écritures saintes, cette dernière a transformé le paradis en pandémonium. Pour se venger d’avoir été relayée aux officines du mal, elle agit sur les hommes comme un maléfice, qui concourt à leur perte.

C’est une œuvre magnifique, accolant une forme romanesque des plus originale à la source de la condition féminine. La démonstration épouse le rituel du sacrement du pardon alors que sept hommes d’affaires ambitieux débitent de soi-disant actes peccamineux, tout en se disculpant sur le dos d’une femme aux lèvres fendues, portefaix de leurs maux. Une vierge laide qu’ils désirent l’instant d’une transaction, une vierge qui incarne le mal dans la souffrance qu’elle transmet à ceux qui l’approchent. À quelques exceptions près, les fautes avouées dans le confessionnal ne ressemblent en rien aux formulations de naguère. C’est le lieu pour véhiculer la thématique que l’auteure enrichit à travers l’évocation des sens. Chaque chapitre baigne dans une atmosphère érotisante qu’accentuent les odeurs d’épices et de savons. Produits auxquels réfère l’auteure à la manière des reporters en leur faisant occuper des pans trop larges au cœur de la fiction.

Hormis ce bémol, c’est avec un vocabulaire ad hoc et un don de conteuse accomplie qu’elle exhale le corps, Un corps que représente la couverture aguicheuse du roman, voire blasphématoire, mais qui résume en fait le propos. Un corps nu, dont le sexe est masqué par le cœur ornant la statue traditionnelle de Jésus adulte, dite du Sacré-Cœur. Un corps contraint qu’il faut libérer. Bref, Martine Desjardins s’est détournée de la voie céleste pour examiner ce qui grenouille dans les souterrains des religions triomphantes telles que l’islamisme et le catholicisme.