Paul-André Proulx

Littérature Québecoises

Grandmont, Serge.

Opus incertum. Éd. des Glanures, 1998, 187 p.

Un éclectisme agaçant

Les Éditions Les Glanures de Shawinigan publient souvent des auteurs qui en sont à leur première œuvre. On a eu droit au gros lot avec Perro (Bryan Perreault), mais hélas, ce n'est pas toujours le cas. Avec Opus incertum, on n'a pas enrichi la littérature québécoise. On peut ranger cette œuvre dans le rayon des départs ratés et espérer que la prochaine publication de l'auteur soit plus probante de son talent. Depuis 1998, on l'attend toujours.

Opus incertum est composé de 22 nouvelles aux sujets variés comme l'indique le titre un tantinet prétentieux. Elles ne sont pas réunies en fonction d'un fil conducteur. Elles manifestent plutôt l'éclectisme de l'auteur. On sent que Serge Grandmont pourrait écrire une œuvre plus forte, mais il s'est laissé aller à la facilité. Il a glané ici et là quelques idées et, par un heureux hasard de circonstances, il a réussi à faire publier ses feuillets, qui rappellent ceux des élèves doués. Je peux même imaginer que ses textes ont été écrits alors qu'il était étudiant.

L'auteur jongle avec tous les genres. Parfois, il navigue dans les eaux inconnues du fantastique, plus loin, il saute les cascades de l'humour et, quand il rend hommage à sa femme (ce qui doit marquer le début de sa vie adulte), il navigue dans les eaux tranquilles de sa prochaine paternité alors que sa Volvo, comme une grande fille, se rend seule au parc destiné aux voitures qui ont rendu l'âme. On dirait du Stefen King dans Christine. D'ailleurs, certaines nouvelles sont des réminiscences des lectures préférées des jeunes.

L'auteur a un don qui sommeille en lui, c'est évident. En plus, sa plume est incisive. Tout le passionne, mais pour bien écrire, il faut donner la chance à ses idées de décanter. Avec Les Créatures mythologiques et La Volvo, l'auteur a atteint une certaine perfection. La nouvelle de l'homme du désert est aussi très réussie. Quand Dieu lui apparaît pour le féliciter de sa sainteté, le héros en profite pour lui administrer une raclée pour le monde injuste qu'il a créé. Mais c'est bien peu dans un ensemble de 22 nouvelles. C'est dommage parce que l'auteur sait concocter des amorces qui captivent à coup sûr le lecteur. Hélas, le reste n'est pas fameux. Et même l'humour est très estudiantin. Bref, ça manque de maturité.